"C’est l’album le plus réjouissant de cet hiver ! Ce conte médiévalo-féministe est jubilatoire. La BD a tout un travail à la fois graphique et sonore, avec le langage dessiné, la présence de ménestrels et les deux grenouilles qui forment une sorte de chœur qui accompagne le prince. J’insiste sur la question du son dans cette bande-dessinée, qui réussit à donner une forme aux onomatopées et à inventer un nouveau langage. (...) Camille Potte inverse les codes du conte traditionnel tout en en gardant les archétypes. Elle met en place une sorte d’utopie, en parlant de démocratie, de populisme, mais aussi de féminisme. Le dessin, qui fait référence à tout l’univers des années 1970, m'a d’ailleurs aussi fait penser aux jeunes dessinatrices féministes d’aujourd’hui qui ont cette esthétique élastique, cette fluidité." Catherine Robin - France Culture

« C’est après avoir découvert La Fourmilière que j’ai décidé d’envoyer mon premier manuscrit chez son éditeur Atrabile. Michael DeForge est un grand génie qui cette capacité à créer des univers étranges et biscornus avec un dessin aux frontières de l’abstraction, dans lequel on se dit qu’on ne va jamais réussir à rentrer, genre intello-indé-bizarre, mais en fait, au bout de deux pages on est happé. C’est très étonnant, ça ressemble à peu de chose que je connais, avec des couleurs un peu sucrées, des personnages un peu abstraits ou monstrueux, mais tout se tient. Michael DeForge est un virtuose de la narration. »

« C’est mon film préféré de tous les temps, de deux qu’on emmène sur une île déserte. Comme dans First Cow, les ingrédients utilisés ne donnent pas le résultat auquel on pouvait s’attendre. Jarmusch mélange l’esprit samouraï, le hip-hop, la mafia italienne, tous les ingrédients d’un film pour mecs, pour finalement aboutir à un film d’une absolue douceur, d’une grande portée philosophique. Ghost Dog réserve aussi son lot de tragédies, mais le film ne va jamais là où on pensait. C’est un film d’une grande élégance. Et Forest Whitaker est le mec le plus cool de tous les temps ! »

« C’est un livre que j’ai découvert pendant l’écriture de Ballades et qui raconte l’histoire de Marie de France, la bâtarde d’Henri II d’Angleterre, qui est la première poétesse à écrire en français dont on retrouvera des poèmes. Elle sera chassée de la cour par la reine Aliénor d'Aquitaine qui l’enverra dans un couvent. Matrix est un livre magnifique et cosmique, qui parle d’un univers quasi exclusivement féminin avec des scènes lesbiennes très érotiques. Il y a notamment une scène où Marie de France qui souffre de la ménopause et qui pour calmer ses bouffées de chaleur va se baigner dans un lac sous le regard d’une nonne. Lauren Groff fait de cette scène quelque chose de très, très érotique. » 

« Audre Lorde est une figure majeure du féminisme et de l’antiracisme que j’ai découvert pendant le confinement. Zami est ce qu’elle appelle une biomythographie - un récit qui mêle biographie et mythes. Audre Lorde a vécu dans une précarité financière extrême mais elle n’a jamais arrêté d’écrire et de lutter. Zami est un récit sur comment une femme lesbienne, noire et pauvre est aussi devenue une des grandes figures de la poésie. C’est une superbe histoire de vie racontée par une grande figure de la littérature. »

« Le Monde de Joseph est un livre pour enfants que mes parents me lisaient quand j’étais petite. D’une manière générale, j’aime les récits avec des cabanes et des installations avec les listes de ce qu’il faut emporter, comment la maison est construite etc. Ça doit faire appel en moi à mon amour du rangement ! Ici l’histoire se déroule dans un monde étrange dans lequel Joseph ressent le besoin d’aller vivre hors du village. Il part accompagné de son père pour trouver l’emplacement idéal, dans une clairière, afin d’y construire sa maison. Là, Joseph va rencontrer une fée, et aussi un phacochère qui parle mais qui ne sait dire que “non”. C’est un livre étrange qui fait un peu peur, mais qui prend les enfants au sérieux. »

« Lala &ce est une rappeuse française avec ce petit truc entre mystère et timidité. Solstice est un album très narratif, avec des morceaux très différents, parfois très sensuels, parfois très dansants, très success story, avec ce côté culte de la personnalité très présent dans le rap. Le fait qu’elle soit lesbienne en fait un avantage supplémentaire dans ses chansons. De manière provocante elle s’adresse aux mecs en leur disant que leurs meufs vont les quitter pour venir avec elle ! C’est malin. Elle est hyper cool. »

« J’ai découvert Robert Wyatt avec mes parents. Je trouve “Yolanda” sublime. J’aime énormément la simplicité de ses interprétations, cette voix dont on a l’impression qu’elle sort d’une gorge qui manque d’air. C’est très, très beau. »

« Clairement ce choix de Princess Bride est un clin d'œil à ma BD. Le seul problème de ce film, c’est que la princesse est un peu empotée, mais c’est Robin Wright qui est tellement belle que je ne peux pas lui en vouloir ! Dans ce film, tous les personnages, même secondaires, ont un vrai destin et je trouve ça toujours bienvenu. C’est très drôle, carton-pâte, c’est un bon film de Noël ou du dimanche pas trop débile. »

« J’ai découvert ce groupe sur scène en Belgique. C’est du punk avec de très belles arythmies, un punk assez groove, avec des chansons sur la timidité entre autres sujets. C’est du punk sensible. En concert c’était totalement formidable. C’était parce que le groupe s’est, hélas, séparé depuis. »

« Ce choix parce que Bill Watterson est trop drôle et doux, comme ce regard qu’il pose sur l’enfance et qui nous fait nous interroger, nous les adultes. Et puis le fait qu’il ait toujours refusé de faire des produits dérivés ridicules, c’est magnifique. J’ai beaucoup de respect pour son travail. »

« J’ai découvert ce film en même temps que La Théorie de la fiction-panier d’Ursula K. Le Guin, et pour moi, First Cow est un film-panier parfait. Habituellement le western met en scène des récits de batailles et de colonisation, ici c’est l’inverse. C’est comment on va raconter une histoire de souvenirs, de gourmandise et d’amitié dans un environnement austère et violent. Kelly Reichardt filme tellement bien le goût que peuvent avoir les gâteaux, le goût du beurre ! La photo du film aussi est fabuleuse, totalement au service du récit. C’est un film d’une grande intelligence et palpitant à la fois. Un vrai western façon fiction-panier. »