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En PhysiqueLes Parrhésiens
Philippe Bordas - Livre - Gallimard - 2025« Rabelais nommait Parrhésiens les vrais Parisiens, ceux dotés de la forte parole et du courage de tout jeter à la face d'autrui. Il fut un temps, pas si lointain, où les habitants de Paris ne parlaient pas le français actuel, si exsangue et dilué, mais cette langue de forte sève célébrée par Rabelais. Ces spécimens d'ancienne roche avaient vu le jour dans les quartiers populaires et grandi sur les berges de Seine. D'année en année, la hausse des loyers les avait repoussés aux banlieues limitrophes, boutés hors des beaux immeubles où s'étaient installés de nouveaux venus, riches en capitaux, mais de pauvre langage. Un jour, par hasard, alors que je pensais ces Parrhésiens disparus à jamais et leur langue évanouie pour toujours, j'avais découvert, dans une ruelle de Montparnasse, un repaire de grandes gueules et de crache-feu où les vieux bisons revenaient à la nuit tombée, tels les zombies sortis de terre des films de John Carpenter. »
Tout Rabelais
François Rabelais - Livre - Bouquins - 2022« Avec ses deux mille pages, ce volume émarge au catalogue de la collection Bouquins comme le plus épais jamais imprimé. Rabelais le marionnettiste des géants écrivait à la gigantale : il se voit honoré de la première édition plus-que-géante-et-complète, encyclopédique et titanique à souhait. Aux cinq livres du Grand Œuvre — Pantagruel, Gargantua, Le Tiers livre, Le Quart livre et Le Cinquième et dernier livre — s’ajoute, pour la toute première fois (avec la version originelle et, en regard, une translation en français actuel), l’intégralité des textes de circonstances dûment signés par Rabelais. Mariant le français haut et le français bas, Rabelais est une occurrence unique dans l’histoire du verbe français, comme Dante l’est dans l’arbre généalogique de l’italien et Joyce dans celui de l’anglais. »
Jean le Bleu
Jean Giono - Livre - Le Livre de Poche - 1932« En 1936, Paul Nizan écrivait dans L’Humanité : « Il est très remarquable que le roman français s’oriente visiblement vers la recherche d’un style parlé, chez des écrivains comme Giono, Aragon et comme Céline. » Façonneur de mystères écrits avec l’accent rocailleux et chantant des montagnes hautes de la Provence, cuisinier de succulences régionales aux limites du lexique et de la grammaire, le grand Giono, celui de Jean le Bleu et Un de Baumugnes, a élaboré une extraordinaire fausse oralité paysanne, aussi artificielle et artistiquement travaillée que la fausse gouaille populacière de Céline, que l’on a cru à tort décalquée de l’argot. Giono se disait « artisan d’images ». Il a écrit le monde naturel dans une langue qui ne l’est pas. Mais cet innaturel est un enchantement. Dans le sillage de Céline, Proust, Aragon et Morand, Giono est le styliste le plus sous-coté du siècle vingtième. »
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L'Invention de l'écriture
Philippe Bordas - Livre - Fayard - 2010« Doté des dons multiples de poète, prophète, dessinateur, encyclopédiste et génial inventeur d’alphabet, l’écrivain ivoirien Frédéric Bruly Bouabré, né en 1921, demeure l’une des hautes figures de l’art et de la pensée africaine du siècle dernier. Découvert avec l’exposition les Magiciens de la Terre, à Beaubourg, en 1989, pour ses séries de tarots colorés encadrés de légendes naïves et savoureuses, il a trouvé la gloire mondiale comme artiste et plasticien, a été exposé à New York après son décès, au MOMA, en 2023. Mais l’essentiel de son œuvre, un inouï corpus de haute narration et de haute poésie reste à découvrir : une œuvre écrite sur des centaines de cahiers d’écolier qui, durant des années, resta entassée au secret de sa chapelle-bibliothèque, dans son village natal, au nord du pays, au cœur de l’ethnie bété à qui il offrit un système d’écriture de plus quatre cents pictogrammes. »
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So British !Voir la vidéo
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Les Portes
Gauz - Livre - Le Nouvel Attila - 2024« Célinien guévariste, provocateur griotique diplômé de biochimie, photographe, scénariste et satiriste à l’acide, Gauz est l’écrivain le plus rabelaisien et volcanique du moment. Quand il quitte la grande forêt primaire de Daloa, au nord de la Côte d’Ivoire, en 1999, il galère comme vigile à Paris et en tire un roman de haute sève, tragique et cocasse, Debout-Payé, l’odyssée des vigiles blacks des Champs-Élysées. Taillé comme Frazier, tribun comme Danton, il récidive avec Camarade Papa, un roman décapant sur la colonisation, vu par un Blanc colon. Son dernier opus Les Portes, s’inspire du mouvement des sans-papiers à Paris en 1996 et de l’occupation de l’église Saint-Bernard de la Chapelle. Gauz, 54 ans au compteur et 100 kilos de muscles à la pesée, mélange les langues à bel effet, le français à toutes ses strates, comme les argots urbains des pays lointains : c’est un poéticien de forte oralité et un politicien, dialectique et joueur, qui met à nu les racialismes ambiants et dépasse, par sa finesse d’invention polémique, les limites de certains wokistes actuels moins balèzes que lui. »
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Pikaaboo
Kendrick Lamar - Audio - Polydor - 2025« En dehors de l’inouïe prouesse vocale, un pur exercice de virelangue, comme s’en proposent les écoliers pour prononcer vite sans fourcher des locutions impossibles à syllaber (telles que « Il reste treize fraises fraîches. »), ce morceau est assis sur un beat de terrifiante gravité, pondéreux et gravide à souhait. L’écriture, prose ou poésie, n’est que rythme et une part organique du rythme touche à cette profondeur quasi stomachale de la vibration. Lamar répète plein de fois d’affilée : “ What they talkin’ ‘bout ? They ain’t talkin’ ‘bout nothin’ “, sans bégayer ni avaler une syllabe. Le rap n’est pas que revendicatif, il se joue de la répétition frénétique et de la grande vitesse, c’est une jongle impressive qui terrasse l’adversaire plus fort qu’une insulte. Chaque phrase commence par ce gimmick, le mot peekaboo (“coucou ?” en français), les mots n’étant plus agglutinés en frénésie que pour faire percussion et ajouter encore à la frime, à l’insolence de Lamar, plus toiseur au micro qu’Ali à la pesée. »
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C-Walk
Kurupt - Audio - A&M - 2009« Kurupt, était l’un des meilleurs mécaniciens sonores de Death Raw Record de Snoop Dog et dr Dre. Kurupt était aussi l’un des membres des Rollin 60’s Neighborhood Crips, une faction des Crips de Los Angeles, les seuls habilités à danser le C-Walk, abréviation du Crip-Walk. Ce C-Walk est une danse tirant son origine d’une danse codifiée par les membres des Crips, le célèbre gang de rue de Los Angeles. On dirait le dandinement subtil d’un gros ours dansant sur un brasier, s’amusant de pas de biche sur un tapis de feu. Le C-Walk était au départ un rituel macabre et glacial observé par des Crips après avoir assassiné ou tabassé un membre des Bloods, le gang adverse. Le rappeur WC expliquait, à propos du C-Walk : « The gangstas don’t dance, they boogie » (« Les gangsters ne dansent pas, ils « boogient ». Au lieu d’un abonnement à une salle de gym, je conseille de suivre les incroyables tutoriels de C-Walk qui abondent sur le net. »
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Tha Shiznit
Snoop Dogg - Audio - DEATH RECORDS - 1993« Mon morceau préféré de Snoop Dog, une orchidée d’arrogance stylée, plantée au milieu de l’album historique, Doggystyle, de 1993, qui fit du long lascar dégingandé, le grand patron du rap west coast. Outre le brio du texte, la poétique voyoute imparable, l’assertion savoureuse et hautaine de la domination personnelle de Snoop sur la violence de la rue comme sur les délices du sexe, “Tha Shiznit” est une splendeur de flow, de diction détachée imperturbablement scandée. L’italien offre le mot sprezzatura pour signifier tout à la fois la morgue méprisante et l’apparente facilité, volontairement calculée, à l’exécution d’une tache de haute difficulté. Les Américains ont le mot swagalicious, compaction de swag (le style, la classe, l’allure facile) et de delicious. Le titre signifie tout simplement « Le meilleur », « The Best ». De couplet en couplet, l’allure s’accélère, mais Snoop Dog demeure soudé à son rail d’imperturbable sérénité rythmique, les voix se superposent et, à un moment, toujours me vient ce rêve d’une prose, d’une matière littéraire douée de même flow et de mêmes multiples voix, comme si l’écrivain s’était tout soudain démultiplié. »
Mathieu Van der Poel. Champion cycliste.
« Dans L’Éve Future (1886), Villiers de L’isle-Adam rêve qu’un ingénieur façonne une andréide, une femme parfaite, synthèse de toutes les qualités : une sorte d’œuvre supérieure, un être de chair devenue une pièce d’art. Pour l’amoureux du cyclisme que je suis, il se trouve que, depuis quelques années, un exemplaire de champion, doté de tous ces mêmes attributs surnaturels, gagne les courses de haute volée. Sa naissance est déjà en soi une ingénierie génétique : il est le fils d’Adrie Van Poel, star du peloton des années 80, et petit-fils de Raymond Poulidor, le prodige gaulois tant aimé des Français. Il est long et délié comme le père, blondin et félin comme lui, mais il possède en outre la charpente large du grand-père, des épaules de métayer, des reins de forgeron et l’endurance bestiale, face aux pires climats, d’un trappeur du Canada. En outre, il s’est stylisé et façonné, en empruntant des perfections supplémentaires à d’autres sublimes cyclistes. Qu’il soit secoué par les pavés ou menacé par la boue de Paris-Roubaix, il pédale de la pointe comme Jacques Anquetil, le champion le mieux fuselé de tous les temps. Sur les sols défoncés, il montre l’adresse diabolique et la virtuosité de Roger de Vlaeminck, le recordman des victoires à Roubaix. Au surplus, ajoutant à toutes ces hybridations de laborantin l’image du centaure, il libère une puissance en watts proche de celle du cheval. »
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True Detective - saison 1
Nic Pizzolatto - Video - HBO - 2014« Alors que les romans contemporains révèlent une indigence narrative grandissante, que les auteurs oublient leurs prérogatives artistiques les plus raffinées et se soumettent à l’écriture simple linéaire des mauvaises séries télévisées ; alors que le niveau romanesque chute, la qualité de certaines productions télévisuelles passe l’entendement. La complexité et sophistication scénaristiques de la Saison 1 de True Detective en est l’exemple le plus brillant. Comme de nombreux écrivains de valeur, Nic Pizzolatto s’est tourné vers le scénario, en y injectant des virtuosités narratives, des flashbacks, des excursus poétiques dignes de plus grands romans. Bref, cette « écriture » débridée, offerte à une chaîne payante, dépasse la moyenne si basse des romances françaises. Je revois cette Saison 1 et les suivantes avec même plaisir constant, de la même façon qu’on relit un ouvrage de la Pléiade. »
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Patricia Tourancheau, ses adieux au 36La loi des sériesÉros et Priape
Carlo Emilio Gadda - Livre - Christian Bourgois Editeur - 1967« Les grands dictateurs ont leurs mille livres d’histoire, leurs mille sommes biographiques, rarement un roman ou à un essai poético-pamphlétaire d’une puissance démente. Hitler et Staline n’ont pas d’Iliade ou d’Odyssée, mais ce gros chauve éructant de Mussolini a eu droit à la plume de Carlo Emilio Gadda (1893-1973), le plus grand écrivain italien du siècle dernier, salué tel par tous et, en premier, par Pasolini. Pamphlet débridé, d’un brio hallucinant, publié en 1967, Éros et Priape est un texte composite, mêlant l’analyse et la rage débordante, l’essai et l’invective. À façon hilarante et savante, Gadda établit une causalité freudo-érotique à la fascination exercée le pouvoir fasciste, en Italie, entre 1922 et 1945. La première partie est centrée sur la figure caricaturale et sexuelle du Duce, sa rhétorique de matamore ; la seconde sur le narcissisme coupable de la société qui favorise l’épanouissement du fascisme, tout spécialement les femmes, précisons-le, si sensibles, selon Gadda, à l’aspect érectile et turgide du dictateur. »
Rue des maléfices ; chronique secrète d'une ville
Jacques Yonnet - Livre - Libretto - 1954« Tant d’opus fabuleux ont été écrits sur Paris qu’il serait vain d’en faire la liste ou d’en opérer le classement. Raymond Queneau (il n'était pas le seul) regardait Rue des Maléfices comme le plus grand livre jamais écrit sur Paris. Un livre qui l'empêchait de dormir, car les histoires " vraies " que l'ami Yonnet, connaisseur des plus sombres venelles de la rive Gauche raconte dans ces pages (photos de Doisneau à l'appui) ne sont pas de tout repos. Sentiment d'un autre connaisseur : " Parmi les livres à commander avant le Paradis: Rue des maléfices de Jacques Yonnet. " Raphaël Sorin.

Les Parrhésiens
Philippe Bordas

Tout Rabelais
François Rabelais

Jean le Bleu
Jean Giono

L'Invention de l'écriture
Philippe Bordas

Les Portes
Gauz

Pikaaboo
Kendrick Lamar

C-Walk
Kurupt

Tha Shiznit
Snoop Dogg

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Nic Pizzolatto

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